Vraisemblablement, peu de temps de temps après la disparition de saint Martial, au début du IVème siècle, sa sépulture est lieu de culte.
La cripta qui conservait le corps du saint (au coeur d'une nécropole), d'abord unique, est associée à une basilique Saint-Pierre dans la moitié du VIème siècle. Les textes témoignent sans ambiguïté de la présence de clercs, les servientes, pour desservir l'oratoire primitif, mais ils restent muets sur d'éventuels aménagements. Dans les siècles suivants, on sait seulement que les clers s'organisent en une congrégation de chanoines probablement au cours du VIIIème siècle. On possède, pour le tout début du IXème siècle, la première mention des trois cryptes juxtaposées qui forment l'espace privilégié d'un pèlerinage grandissant.
C'est en 848 que l'on peut réellement parler d'abbaye Saint-Martial avec l'adoption, par les chanoines, de la règle bénédictine. L'abbé Aimard profite alors d'un passage de Charles Le Chauve à Limoges pour lui soumettre son projet et obtenir sa bénédiction. C'est dans ce contexte que doit se placer l'édification de la basilique du Sauveur. Par tradition cependant, l'église est attribuée à la munificence de Louis le Pieux, et remonterait donc à une date antérieure à 840, année de la mort du souverain, mais rien de sérieux ne l'atteste.
(Source - Saint-Martial de Limoges, Ambition politique et production culturelle (Xe-XIIIe))
Le mausolée de Saint-Martial
La crypte archéologique de la place de la République à Limoges, conserve les vestiges du tombeau de saint Martial, le premier évêque de la ville (au IVe siècle), et de deux chapelles (Saint-Pierre-du-Sépulcre et Saint-Benoît) appartenant autrefois à l'ancienne abbaye Saint-Martial de Limoges. Ces vestiges furent dégagés au cours de plusieurs campagnes de fouilles menées de 1960 à 1974.
Après une relecture du texte de Grégoire de Tours (538-594) et de ce qu'on sait des pèlerinages au tombeau de saint Martial, le sarcophage attribué dans un premier temps à saint Martial et à ses côtés celui de sainte Valérie s'agirait des tombes de ses deux compagnons, saint Alpinien et saint Austriclinien.
Le sarcophage de saint Martial serait celui attribué traditionnellement à Tève le Duc dont le nom n'apparaît qu'à la fin du premier millénaire. Quoiqu'il en soit la sépulture de saint Martial se trouvait dans cette crypte.
En 576 Gregoire de Tours nous apprend qu'on célébrait en ce lieu, toute la nuit, les vigiles de la fête de saint Martial.
Hypothèse de l'église du Saint-Sépulcre et du mausolée de saint Martial au VIème siècle
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pour la Ville de Limoges "L'abbaye de Saint-Martial de Limoges"
Coupe du choeur de l'abbatiale romane de Saint-Martial
Dessin au lavis 1726 - Cabinet des Estampes BNF
Basilique du Saint-Sépulcre au IXème siècle
Dessin Jean LEVET
Le culte de saint Martial en Occident
Le culte de Martial atteint son apogée avec la consécration de la nouvelle basilique en 1028, évènement que l'on connaît par le chroniqueur Adémar de Chabannes. Désormais on invoque Martial à chaque grand fléau. Ainsi pour l'année 1094, à propos d'une épidémie du mal des ardents qui frappe à nouveau le peuple aquitain, le chroniqueur Geoffroy de Vigeois relate qu'on apporta des saints corps de toute la ville de Limoges à Saint-Martial où se dirigea le peuple et les grands.
L'utilisation "politique" du culte est attesté pendant tout le XIIème siècle. Le rôle de Martial pacificateur est conforté à la fin des années 1120, quand deux seigneurs en hostilité permanente, Adémar vicomte de Limoges et Gaucelin de Pierre-Buffière, se réconcilient sur le tombeau, en compagnie de l'abbé Amblard, de l'évêque Eustorge et de nombreux chevaliers.
Patron de l'Aquitaine, Martial garde aussi sa fonction spécifique de sauvegarder la paix, y compris dans les miracles tardifs, notamment dans le recueil de 1388 lors de la guerre de Cents Ans. Dans cette oeuvre se manifeste un véritable sentiment politique anti-anglais, et Martial intervient souvent comme libérateur de leurs victimes.
Les pèlerinages royaux révèlent la dimension politique du culte. En 1272, Philippe le Hardi, son frère Pierre, comte d'Alençon, ainsi que l'évêque d'Angers sont reçus à Limoges. Charles VII et le dauphin Louis viennent se recueillir en 1438. Ces visites indiquent que Martial figure désormais dans le "panthéon" des saints auxquels les rois de France vouent un culte.
(Source - "Saint-Martial de Limoges, Ambition politque et production culturelle")
Reconstruction de l'abbatiale du Sauveur au XIème siècle
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pour la Ville de Limoges "L'abbaye de Saint-Martial de Limoges"
L'évolution de l'abbaye de Saint-Martial de Limoges
Les bâtiments primitifs situés autour du tombeau de saint Martial étant devenus trop petits pour accueillir les pèlerins, dont le nombre ne cessait de grandir, on entreprit au milieu du IXème siècle d'élever une nouvelle basilique, plus importante, sous le vocable du Sauveur, contigüe vers le sud à la basilique Saint-Pierre-du-Sépulcre. Une partie de cette dernière église fut peut être démolie pour faciliter la construction du nouvel édifice. La basilique du Sauveur, endommagée par un incendie, fut réédifiée en 952, et c'est sous l'abbé Gui (974-991) que fut commencé le grand clocher de la façade.
Le basilique carolingienne, jugée à son tour insuffisante à cause du développement considérable du pèlerinage, surtout après l'épidémie du Mal des Ardents qui sévissait en Limousin en 994 (la disparition de cette maladie fut attribuée à l'intervention miraculeuse de saint Martial) céda la place à un édifice encore plus vaste, entrepris au début du XIème siècle et solennellement dédicacée en 1028.
Après un nouvel incendie en 1053, une campagne de construction poursuivie sous l'abbatiat d'Adémar de Chabannes permit l'achèvement de la basilique romane du Sauveur : celle-ci fut consacrée par le Pape Urbain II le 30 décembre 1095. Cet édifice, qui subit à son tour divers remaniements en 1182, puis au cours du XIIIème siècle et XVème siècle, a subsisté jusqu'à la fin du XVIIIème siècle.
(Source - Limoges, Crypte Saint-Martial)
Jusqu'au XXème siècle on pensait qu'il existait un premier cloître au sud de la basilique. C'était une mauvaise interprétation du terme "la Claustre" qui ne signifiait pas "cloître" mais place fermée où des échoppes faisaient du commerce.
Vue cavalière du monastère Saint-Martial au XIVème siècle
Dessin Jean LEVET
La basilique du Sauveur de l'abbaye de Saint-Martial
Elle mesurait hors-d'oeuvre 102 m de long, la nef avait 21 m de large et le transept se développait sur 66 m. Elle comprenait une nef de dix travées à bas-côtés, un transept à collatéraux avec une absidiole s'ouvrant à l'Est sur chaque bras et un choeur entouré d'un déambulatoire à cinq chapelles rayonnantes. Les collatéraux de l'abbatiale sont extrêmment larges environ 4,50 m pour chacun et 8 m pour le vaisseau. Les travées collatérales forment un module de plan au sol pratiquement carré, ce qui donne un rythme cadencé et serré pour les travées du vaisseau.
La croisée était voûtée en coupole, une tribune s'élevait au dessus des bas-côtés. A l'Ouest de la nef, devant l'entrée principale, se dressait un clocher-porche à quatre étages. Les deux étages inférieurs étaient de plan quadrangulaire et les deux étages supérieurs de plan octogonal : le passage d'un plan à l'autre était masqué par des gâbles. Vous retrouverez ce type de clocher-limousin dans d'autres édifices propres au Limousin.
(Source - Limoges, crypte Saint-Martial / Guides archéologiques de la France)
Abbaye sous Louis le Débonnaire et après restauration du clocher
vers 1750. Extrait de J.B Tripon 1837.
L'abbaye de Saint-Martial au XIIème
avec son cloître principal au Sud de la basilique du Sauveur
L'abbaye de Saint-Martial au XIVème après la construction du cloître au Nord de la basilique du Sauveur
On a depuis longtemps identifiée un ensemble d'églises dites de pèlerinage. En dépit des réserves qu'il faut émettre sur le caractère faussement rigoureux mais rassurant des classifications en matière stylistique, le constat est toujours là : les choix architecturaux romans sur le site peuvent se traduire par une suite définie de composantes soit :
-
un déambulatoire à cinq chapelles rayonnantes,
-
une chapelle axiale plus ample,
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des tribunes ouvertes sur de larges baies jumelles,
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une continuité des tribunes entre nef et transept jusqu'à la travée droite du chevet comprise,
-
un relais assuré dans la partie tournante par un simple passage intra muros,
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une élévation à haut berceau sans clair-étage
-
un usage exclusif du plein cintre,
-
enfin une haute tour de croisée, probablement lanterne.
Hors cette "équation" isole un groupe de cinq édifices : Saint-Martial se retrouvera dans les édifices de Saint-Martin de Tours, Saint-Sernin de Toulouse, Conques (dans une moindre mesure) et Saint-Jacques de Compostelle.
(Source - Saint-Martial de Limoges, Ambition polotique et production culturelle)
La construction de l'abbaye de Saint-Martial quasi compète entre 1028 et 1095 et le style des chapiteaux conduisent à s'interroger sur la place de ce monument dans le contexte du fameux groupe des églises de pèlerinage. Si l'on compare avec Conques dont les travaux avient commencé en 1030, avec Saint-Sernin de Toulouse, où ils commencent vers 1060, et avec Saint-Jacques de Compostelle entamé en 1075, Saint-Martial apparaît comme une des plus anciennes des églises du groupe.
(Source - Saint-Martial de Limoges, Ambition polotique et production culturelle)
Contrairement donc aux propos des historiens du XIXème qui soutenaient que les édifices de type "Ecole de pèlerinage" avaient été influencés par l'exemple de la cathédrale de Compostelle, c'est à l'inverse l'édifice le plus récent. Ce n'est pas le pèlerinage Jacquaire qui a fait naître l'architecture de ces abbatiales en vue de promouvoir le sanctuaire Galicien.
Saint-Martial de Limoges dans son ensemble harmonieux, présentait le plus tôt l'ensemble des caractéristiques, mais c'est sûrement, au final, le sanctuaire Toulousain et la gloire de la mise en valeur de son pèlerinage qui inspira les bâtisseurs de Compostelle.
Les chapiteaux sculptés de l'abbaye de Saint-Martial de Limoges
Du décor sculpté, dix huit chapiteaux furent mis à jour en 1995, alors qu'il soutenaient les poteaux d'un bâtiment agricole dans une propriété des environs de Limoges. Ce qui porte aujourd'hui à trente-sept corbeilles conservées.
Les trente-sept chapiteaux offrent une grande diversité quant au matériau (vingt-six sont en granit, et les onze autres, dont un double, en calcaire).
Les chapiteaux parvenus jusqu'à nous appartiennent au XIème siècle, ce qui invite à relativiser l'importance des destructions invoquées pour le siècle suivant par les incendies.
Certains chapiteaux sont nettement marqués par les motifs des enluminures antérieures au milieu du XIème. En effet on ne retrouve pas les sources d'inspiration de la Bible de Saint-Martial attribuée à la fin du XIème siècle qui influencera nombre de chapiteaux limousins des environs de 1100, que ce soit à Saint-Junien ou à Beaulieu.
Chapiteaux romans de l'Abbaye Saint-Martial de Limoges
Chapiteaux romans de l'Abbaye Saint-Martial de Limoges
C'est dans la période du XIème siècle où l'abbaye jouit d'un rayonnement prodigieux que sont réalisés ces chapiteaux. les chantiers de sculpture des transepts de la fin du XIème siècle d'Uzerche et de Beaulieu ont repris les modèles de l'abbaye de Saint-Martial. D'autre part, vers 1100, et d'abord à Saint-Junien, les sculpteurs limousins mettront au point un nouveau type de chapiteau à décor végétal, très plastique, qui n'a plus rien à voir ni avec les modèles antiques et ni avec ceux des enluminures.
Le décor de l'édifice du Sauveur semble suivre une hiérarchisation, qui s'organisait de telle manière : des chapiteaux corinthiens de grand format pour les zones "nobles" (rond-point et choeur), et contemporains, de plus petits chapiteaux déclinant des fantaisies végétales pour les déambulatoires.
(Source - Saint-Martial de Limoges, Ambition politique et production culturelle)
Chapiteaux de l'Abbaye Saint-Martial de Limoges
Les chapiteaux romans de l'abbaye de Saint-Martial de Limoges
Si l'on excepte l'un d'entre eux, en calcaire, tous sont taillés dans du granité. Le rapport de leurs proportions permet de distinguer un module oblong (environ 70 cm de hauteur pour un diamètre de 90 cm à l'astragale), un module barlong (environ 80 cm de hauteur pour un diamètre de 65 cm à l'astragale) ou, pour le plus grand nombre, un module moyen (60 à 70 cm de hauteur pour un diamètre de 60 à 70 cm de diamètre à l'astragale).
Parmi ces oeuvres, trois, dotées d'un abaque échancré, timbré d'un dé central, dérivent du corinthien. La plus grande part de leur corbeille est décorée d'une à trois couronnes de feuilles d'acanthe, grasses ou à lobes non refendus, disposées en quinconce, tandis qu'en partie supérieure jaillissent des hélices et des volutes qui s'affrontent au-dessus d'une palmette en éventail ou de forme trilobée. Un quatrième chapiteau, décoré de trois couronnes de feuilles à lobes non refendus mais dépourvu d'enroulements terminaux, et couronné d'une simple tablette peu développée en hauteur, peut être affilié à cette série corinthienne. Le chapiteau en calcaire dont les feuilles stylisées sont réparties sur trois niveaux, leur est également apparenté.
L'un des chapiteaux est uniquement décoré de crosses disposées sur trois registres qui s'enroulent vers la gauche, sur la face principale, aux rangées inférieures, alors qu'en partie supérieure règne le désordre. Vient ensuite la série des chapiteaux ornés d'un unique registre végétal dont les composantes disposées par faisceaux auxquels se mêlent parfois des tiges entrelacées, ou par motifs plus denses, soulignent le centre et/ou les angles de la corbeille. En dépit de la variété du décor, une certaine unité se dégage de l'ensemble de ces oeuvres sur lesquelles subsistent des vestiges de polychromie (ocre, rouge, gris). Des motifs végétaux issus des enluminures des manuscrits de Saint-Martial (Lectionnaire et Tropaire-prosier de Saint-Martial, notamment) se retrouvent çà et là. Le traitement, « d'une relative grossièreté »,est « limité le plus souvent à deux plans de taille et dépourvu
de toute gravure de finition ».
Seraient-ils redevables à la campagne de construction de l'abbé Adhémar (1063-1 114), consécutive à l'incendie de 1053 ? L'auteur est tentée de le penser.
(Source - Cabrero-Ravel Laurence. Dix-huit chapiteaux inédits de Saint-Martial de Limoges. In: Bulletin Monumental, tome 154, n°3,année 1996)
Les peintures romanes de l'abbaye de Saint-Martial de Limoges
La basilique était certainement ornée de représentations de saint Martial et de ses compagnons. Néanmoins, les indices dont nous disposons à son propos sont très fragmentaires. Simplement peut-on affirmer que l'abbatiale était décorée avant le XIIIème siècle de scènes tirées de l'Apocalypse et de la vie de saint Martial issues de la Vita Prolixior. Les Chroniques de Saint-Martial permettent d'appréhender l'une des représentations du saint qui décorait la basilique. Il s'agit du tympan de la porte latérale sud, que J. Levet a pu restituer à partir des textes de la Chronique, qui précise la nature des inscriptions entourant l'oeuvre. Au XIIIème siècle, un transfert de bâtiments monastiques permet aux pèlerins d'utiliser cette porte. Devenu lieu de passage, la porte est ornée d'un tympan, justement installé "là où on peut le voir". D'après les inscriptions, sur le trumeau apparaissait le Christ présentant sa Croix, tandis qu'au registre inférieur était représentée la Cène, à laquelle assistait le jeune Martial, nommément identifié. Le message est ici tès clair : dans un lieu de passage qui marque l'entrée aux pèlerins dan sla basilique, l'objectif est de montrer aux yeux du plus grand nombre l'apostolicité de Marital.
(Source - Les saints limousins / JC Masmonteil)
Etudes pésentées par l'historienne E. PROUST lors du congrès de la Socitété Française d'Archéologique à Limoges
Exposition Splendeurs de l'art roman - Musée des Beaux Arts de Limoges en 2019
Le scriptorium de l'abbaye Saint-Martial de Limoges
Selon toute vraisemblance un scriptorium était déjà très actif après la seconde invasion normande, mais aucun témoin n'en a été conservé. Les deux incendies de Limoges ne 943 et 974 ont certainement endommagé le monastère. Au demeurant, le Xème siècle est une époque marquée par un certain épanouissement spirituel et matériel qui permet des échanges avec d'autres abbayes porteuses d'influences. Des réseaux d'amitiés se créent donc avec l'abbaye de Fleury-sur-Loire, des communautés de Normandie, la région Parisienne, la Bourgogne, l'Auvergne et le sud-est.
Les productions tourangelles sont connus dès le VIIIème siècle, et l'on retrouve nombre de similitudes dans les manuscrits produits au Xème siècle.
La persistance du style "aquitain" dans les création de l'abbaye de Limoges se vérifie malgré les influences clunisiennes lors du rattachement de Saint-Martial à l'abbaye Bourguignonne de Cluny en 1062. Il semble pourtant que si Cluny a exercé une influence sur la production du scriptorium de Saint-Martial, ce trait n'a fait que se juxtaposer à une tradition artistique très forte qui, fondée sur l'héritage carolingien, a évolué en suscitant des créations puissamment originales.
Aujourd'hui l'histoire a fait que nous puissions contempler une partie de la grande bibliothèque de l'abbaye Saint-Martial de Limoges qui nous a laissé près de 450 manuscrits conservés à la Bibliothèque Nationale de France.
(Source - "Saint-Martial de Limoges, Ambition politique et production culturelle")
L'OEUVRE DE LIMOGES
Il est impossible de dire si l'abbaye Saint-Martial de Limoges a joué un rôle dans la naissance de cette production d'émaux. Cependant elle semble s'être procuré des châsses émaillées relativement tôt, sous l'abbatiat d'Isembert (1174-1198), pour les reliques de saints importants de l'abbaye. Cet abbé a recours à cette production pour plusieurs pièces lorsqu'il doit reconstituer des ornements, suite au pillage d'Henri Le Jeune en 1183, Le rôle et la position particuliers de l'abbaye de Saint-Martial au sein du diocèse, mais également au coeur de l'espace des Plantagenêt, en faisaient un modèle. Dans ce contexte d'autres abbayes et surtout des églises paroissiales ont pû suivre l'exemple en se dotant à leur tour de reliquaires et d'ornements élégants et relativement économiques.
L'abbaye ne pouvait elle-même que profiter des retombées économiques de ce marché puisque les ateliers paraissent avoir été établis dans ses abords et peut être dans l'enceinte du "Château".
On ne peut pas écarter non plus l'hypothèse qu'un atelier d'orfèvrerie ait fonctionné dans l'abbaye même, pour ses propres besoins et en liaison avec la sacristie sous l'impulsion de certains moines. On pense à Guillaume La Conche qui pourrait bien avoir exercé lui-même cet art sur différents métaux.
(Source - "Saint-Martial de Limoges, Ambition politique et production culturelle")
Emaux Abbaye Saint-Martial de Limoges
Abbaye de Saint-Martial de Limoges
Située en bordure septentrionale de l'Aquitaine, l'abbaye de Saint-Martial a connu un important rayonnement intellectuel et artistique. Dans le domaine des Lettres, de l'Histoire, la Musique et de la Peinture, l'abbaye de Limoges fut un lieu majeur de la culture occidentale entre le Xème et le XIIème siècles.
L’abbaye Saint-Martial de Limoges, élevée sur l’emplacement du tombeau de saint Martial (actuelle place de la République), fut durant la plus grande partie du Moyen Âge un établissement d’importance majeure, dont le prestige et le rayonnement dépassèrent largement le cadre de Limoges et du Limousin.
Saint Martial fut, suivant Grégoire de Tours, l’un des sept évêques envoyés de Rome au IIIe siècle pour évangéliser la Gaule. Il fut inhumé, avec deux compagnons, Austriclinien et Alpinien, dans une crypte surmontée d’une petite basilique. Le sanctuaire — future église Saint-Pierre-du-Sépulcre — était desservi par des clercs, qui s’organisèrent en communauté canoniale puis adoptèrent en 848 la règle de saint Benoît au cours d’un concile réuni par Charles le Chauve, en dépit de l’opposition de l’évêque Stodilus.
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Le pèlerinage à l'abbaye de Saint-Martial de Limoges
La renommée de l’abbaye ne cessa par la suite de s’accroître, notamment lors de l’épisode du « mal des ardents » de 994, qui vit la plupart des évêques d’Aquitaine se rassembler à Limoges ; la guérison des malades fut obtenue par l’intercession de saint Martial, dont les reliques firent l’objet d’une translation sur la colline de Montjovis. L’afflux de pèlerins qui s’en ensuivit, mais aussi des destructions accidentelles, rendirent nécessaires la reconstruction de la basilique, consacrée en 1028. L’abbaye Saint-Martial se trouvait, avec le château des vicomtes de Limoges, dans le Château de Limoges, tandis que les bâtiments épiscopaux se regroupaient dans la Cité. En 1031, pour accroître la renommée de saint Martial qui connaît alors la concurrence de l'invention des reliques de saint Jean-Baptiste (et peut être celles de saint Jacques à Compostelle), les moines défendent son apostolicité. Un concile tenu à Limoges en cette même année proclama saint Martial apôtre du Christ. En 1062, le vicomte Adémar fit don de l’abbaye Saint-Martial à Hugues, abbé de Cluny. Les moines de Cluny prirent possession de l’abbaye en 1062. Saint-Martial demeurait cependant une abbaye, et non un prieuré, et conserva un abbé à sa tête.
En 1095, le pape Urbain II consacra la nouvelle église. Intégrée à l’immense réseau clunisien, dont elle constitue un élément prestigieux, l’abbaye conserve cependant dans une certaine mesure ses propres usages. Elle se détache progressivement de Cluny sous l’influence de l’abbé Raymond Gaucelm : un accord intervenu en 1246, confirmé par le pape Innocent IV, fait de Saint-Martial « une abbaye de l’ordre de saint Benoît et non de l’ordo cluniacensis ». La fin du haut Moyen Âge et le Moyen Âge central voient l’abbaye parvenir à l’apogée de la puissance et de son prestige. Une liste des moines dressée en 1123 par Bernard Ithier fait état de 73 moines. Les vitas antiquior et Prolixior favorisent un plus encore la renommé de saint Martial.
Haut lieu de pèlerinage, elle abrite plusieurs confréries et constitue également un très important foyer culturel et artistique. Son scriptorium est particulièrement réputé, tout comme son école musicale. Son influence se fait également sentir dans la production d’orfèvrerie et d’émaillerie limousines. Le chroniqueur Adémar de Chabannes, originaire du Limousin et moine de Saint-Cybard d’Angoulême, y fit plusieurs séjours. Il fut un ardent promoteur de l’apostolicité de saint Martial à travers la Vie de saint Martial qu’il rédige dans les années 1028-1029. Autre moine formé à Saint-Martial, Geoffroy de Vigeois, abbé de Vigeois de 1170 à 1184, rédigea également une précieuse Chronique.
L’abbaye Saint-Martial fut sécularisée en 1535. L’époque moderne est pour l’établissement une période de déclin et voit la dégradation des bâtiments conventuels, dont un certain nombre sera détruit en 1745. En 1791, la démolition de l’abbaye est achevée par la municipalité de Limoges. Les reliques du saint sont transférées à l’église Saint-Michel-des-Lions, tandis que la grande abbaye est détruite. La configuration ancienne des bâtiments est essentiellement connue grâce à des plans anciens, dont le plus connu est celui de 1784, attribué à l’abbé Legros. Entre 1960 et 1967, des fouilles archéologiques conduites à l’occasion de la construction d’un parking souterrain place de la République mirent notamment au jour une partie de l’église Saint-Pierre-du-Sépulcre et le tombeau de saint Martial et de ses deux compagnons, vestiges qui furent préservés dans le cadre d’une crypte archéologique.
Détail du plan de la partie de la ville de Limoges dit "Le Château" et l'abbaye - Jean Fayen 1564 dans Mercator, Atlas terrestre Cabinet des Estampes BNF
SeptaLimoges : De début juin à la fin octobre, des fouilles archéologiques ont été menées sur la place de la République. Situées entre la crypte archéologique – qui abrite le mausolée Saint-Martial et plusieurs édifices de l'abbaye Saint-Martial
Les grandes églises de pèlerinage
Le passage de la vie canoniale à la vie monastique à Saint-Martial de Limoges
Ce n'est qu'à partir de 848, alors que le culte attaché au tombeau de Martial et l'existence de la basilique Saint-Pierre-du-Sépulcre sont attestés dès le VIème siècle, que l'abbaye Saint-Martial apparaît en tant que telle. Mais le service de ce culte de cette basilique, qui avait été organisée par les évêques de Limoges, restait au IXème siècle sous leur contrôle direct : il était assuré, en effet, par des chanoines du chapitre cathédral, dont certains, en outre s'étaient probablement spécialisés dans la gestion spirituelle et temporelle du pèlerinage. Or voilà qu'au milieu du IXème siècle, d'une manière qui paraît assez brutale, un groupe de chanoines décide de faire, à Saint-Martial, le choix monastique, donc d'y vivre désormais selon la règle de saint Benoît imposée au moines depuis le début du siècle par la réglementation carolingienne. Il s'agissait là d'un changement radical, non seulement du mode de vie, mais aussi du statut juridique de la communauté, ce qui nécessitait des reconnaissances officielles en même temps qu'une formation appropriée.
La collusion étroite entre l'empereur Charles-le-Chauve et l'abbaye de Saint-Martial se marque en particulier dans le choix que fait l'empereur pour le couronnement de son fils Charles-l'Enfant comme roi d'Aquitaine en 855 en l'église du Sauveur.
(Source - Limousin médiéval, temps des créations / Bernadette BARRIERE)
Représentation de saint Martial dans la Vita Proxilior
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pour la Ville de Limoges "L'abbaye de Saint-Martial de Limoges"
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L'abbaye de Saint-Martial de Limoges
Louis Guilbert - 1902
Guibert, Louis (1840-1904). Les anciennes confréries de la basilique de Saint-Martial. 1895.
Duplès-Agier Henri, . Le trésor de Saint-Martial de Limoges au treizième siècle.. In: Bibliothèque de l'école des chartes. 1855, tome 16. pp. 28-35.
Chroniques de Saint-Martial de Limoges : publiées d'après les manuscrits originaux pour la Société de l'Histoire de France. 1874 / H. Duples-Agier
Dantreygas, Pierre. Notice sur la vie et les miracles de saint Martial,... enrichies de notes historiques sur Limoges et sur la confrérie de ce saint apôtre, par Pierre Dantreygas,.... 1835.
Saint Martial de Limoges - Ecole des Chartres / L. Duchesne
LA FRAPPE MONETAIRE DE L'ABBAYE SAINT-MARTIAL
Peu de monastère détiennent le droit régalien de la frappe monétaire. L'abbaye de Limoges frappe donc le denier "barbarin" symbole prestigieux de l'autorité à l'échelle régionale.
Le "barbarin", monnayage de l'abbaye Saint-Martial est créé au tout début du XIIème siècle. C'est un denier librement inspiré de celui d'un prieuré de Souvigny, lequel apparaît dans les années 1095-1098. La première mention des barbarins dans un texte daterait de 1106.
Le type, qui sera peu modifié au cours du temps, est caractérisé au droit par un buste barbu du saint, représenté de face, et entouré de la légende abrégée +SCS MARTIAL (pour Sanctus Martialis). Au revers, la croix centrale est cantonnée de huit annelets disposés deux par deux dans chaque canton, la légende circulaire +LEMOVICENSIS entourant le motif du champ.
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